Jan Urroz
militant de l'environnement et de la Charente Limousine.
En ce qui concerne le traitement des déchets, ne devrait-on
pas prendre en compte l'intérêt général
plutôt que les intérêts particuliers? Sur cette
planète, nous ne sommes qu'utilisateurs à titre
précaire et nombreux sont les scientifiques, les conférences
internationales, les accidents climatiques ou écologiques
qui nous le rappellent chaque jour. Nous ne devons pas considérer
la terre comme une poubelle car, tôt ou tard, nous ou nos
enfants auront à en subir les conséquences.
C'est à ce niveau qu'en 2003 devrait se situer l'intérêt
général.
Que voyons nous en Charente? Des entreprises, un syndicat d'intérêts
professionnels font pression sur la population, sur les élus,
sur le représentant de l'état, pour implanter à
Ansac, une décharge de déchets industriels pudiquement
rebaptisée Centre d'Enfouissement Technique. « Qu'en
termes galants, ces choses là sont dites ! » On nous
assomme sous des chiffres tous plus mirobolants les uns que les
autres: projet en 9 volumes, 1400 pages, 113 hectares, 19 alvéoles
de 4000 m², 75000 tonnes par an, 17 ans et des millions d'euros
par an pour les promoteurs de ce projet. Les grands communicateurs
d'Approval et du MEDEF alliés pour la circonstance ont
décidé de la nouvelle vocation de la Charente Limousine:
label déchets.
Pendant 17 ans, (dans un premier temps), une noria de camions
chargés de produits plus ou moins identifiés parcourra
la RD 951 pour emplir des alvéoles qui stériliseront
le Bois de Lacaud pour au moins plusieurs siècles. Une
autre entreprise a des projets semblables au Chêne, à
quelques kilomètres de là mais se propose d'y élever
des chevaux pour s'intégrer dans l'environnement. On croit
rêver.
En 1983, la Charente Limousine faisait la une des journaux avec
le scandale de la décharge de l'Affit à Roumazières,
elle aussi destinée aux « déchets industriels
banals ». Souvenons-nous de l'arsenic, du pyralène,
des résidus de fabrication de chlorophénol (avec
dioxine), ... tous par centaines de tonnes. Cette décharge
avait été autorisée en bonne et due forme
par arrêté préfectoral du 4 juin 1980 (CL
du 24/11/81). L'affaire avait montré le manque de vigilance
(au minimum !) des élus, de l'administration, la duplicité
des « experts », le mépris des « spécialistes
» pour le citoyen de base.
Plus de 20 ans plus tard, la vigilance s'impose toujours. Notre
région, réputée pauvre est toujours dans
le collimateur des affairistes et des technocrates sans scrupules.
Il serait temps pourtant d'évoluer et de s'attaquer à
la vraie question: la réduction des déchets à
la source. Il faudrait au niveau des décideurs de tous
poils, en impliquant la population, s'engager sur cette voie du
''zéro déchet'' que ceux qui profitent de la gabegie
actuelle disent impossible.
La question est politique et doit être assumée comme
telle. Un plan ''zéro déchet'' doit remplacer le
plan départemental.
La mise en uvre devrait se faire au niveau des pays afin
que chacun soit responsable de ses déchets, y compris la
COMAGA qui résout la question en confiant ses productions
à la Charente profonde... Certaines mesures allant dans
le bon sens existent déjà et devraient être
étendues. De nombreuses entreprises locales pourraient
participer au plan et certainement créer davantage d'emplois
que ce que les ''enfouisseurs'' nous promettent.
J'ai travaillé sur les prémices de ce que pourrait
être ce ''projet zéro déchet'' et il circule
déjà dans le Confolentais.
Une fois de plus, la Charente doit choisir entre les routines
du passé et les espoirs de l'avenir.
Va-t-elle, une fois de plus se tromper de chemin ?
le 19/11/2003